Exclusif: L’interview du géohydrologue Bertrand Gonthiez sur la gestion de l’eau dans nos territoires et la récupération de l’eau de pluie chez soi.

Après les incendies, la Grèce a été confrontée à des pluies torrentielles au cours de l’été, en raison du passage de la tempête Daniel. Au delà du phénomène climatique ,la sécheresse en France oblige à se préparer à d’autres restrictions et à s’équiper en conséquence. Notamment avec la récupération de l’eau de pluie. C’est le sujet traité de façon très pratique (Editions Eyrolles) par le géohydrologue Bertrand Gonthiez que nous avons rencontré à Toulouse lors d’une conférence avec Edgar Morin. Quand la philo éclaire nos modes de vie !

La 4éme édition de son guide pratique

Au-delà de l’étude de la gestion de l’eau que fait un hydrogéologue ?
Bertrand Gonthiez: Je suis à la base ingénieur hydrogéologue avec une expérience de plusieurs années dans les pays en voie de développement et plus particulier dans les régions où les ressources en eau mobilisable sont rares. Le métier d’hydrogéologue est intimement lié à l’environnement. Il consiste à étudier les masses d’eau souterraines, à évaluer l’évolution de leur quantité et de la qualité et à donc à aider à gérer les ressources en eau. C’est un métier passionnant et enrichissant humainement qui nécessite d’avoir une vision globale de la gestion de l’eau, impliquant dans les territoires une multitude d’acteurs et d’usagers aux intérêts divers. Mon parcours professionnel m’amène aujourd’hui à travailler sur la performance des réseaux d’eau potable où les problématiques sont bien différentes mais complémentaires ; réduction de fuites d’eau et amélioration de la qualité des réseaux d’eau.

Vous publiez la 4eme édition, chez Eyrolles, de votre livre Récupérer et utiliser l’eau de pluie, qu’est ce qui a changé vraiment entre ces 3 versions ?
BG: La prochaine édition paraîtra le 18 septembre prochain dans toutes les librairies. Depuis la 1ère édition parue en 2009, les expériences en matière d’utilisation d’eau de pluie dans les bâtiments et espaces verts se sont multipliées. J’ai eu le plaisir d’accompagner de nombreux bureaux d’études et installateurs y compris pour des installations situées dans les bâtiments recevant du public. Les matériels ont évolué au fil des ans. Les industriels ont optimisé la filtration ainsi que les systèmes de pompage tout en permettant aux équipements d’être entretenu facilement en s’appuyant sur les normes en vigueur.

Quelle est la règle d’or de l’économie d’eau pour ceux qui résident dans une maison avec jardin ?
BG:La sobriété, la sobriété. Il faut toujours avoir en tête que l’eau qui coule à notre robinet n’est pas si abondante que cela. Elle est le résul
tat d’un processus de captation et de traitement fastidieux pour le quel nous avons beaucoup de chance de bénéficier. Même si le prix peut sembler bon marché (environ 4€ TTC par mètre cube), il risque d’augmenter fortement dans les prochaines années si on en abuse. Pour la maison, je conseille d’installer sur tous les robinets et dans les douches, des systèmes d’économiseurs Ce sont des dispositifs d’eau (mousseurs et pommeaux de douche) qui réduire le débit d’eau sans changer le confort d’utilisation. J’en utilise depuis près de 20 ans et ma consommation est passé de 148 litres à 72 litres/jour/personne dans mon foyer. Ce qui génère donc des économies très importantes en eau mais également en énergie (eau chaude).

Quelle est la différence fondamentale entre l’eau de ruissellement et l’eau de nappes phréatiques ? Selon régions ?
BG: L’eau de ruissellement est l’eau de pluie qui atteint la surface de la Terre. On l’appelle aussi l’eau pluviale. Elle peut avoir plusieurs destins. Une partie de l’eau pluviale s’écoule sur les surfaces imperméables, comme le béton et l’asphalte, créant ainsi des ruissellements. Une autre partie de l’eau pluviale est absorbée par le sol, contribuant ainsi à l’alimentation des nappes phréatiques et au maintien de l’hydratation des plantes. L’eau pluviale peut également remplir les cours d’eau, les lacs et les réservoirs, ce qui en fait une source d’eau douce importante pour l’environnement et l’utilisation humaine. L’eau de ruissellement et l’eau souterraine sont donc intimement liées et cela quelque soient les régions.

L’eau est un bien commun (Public): les activistes nous le rappellent lors des manifestations sur un golf ou une bassine, comment en déterminer les vrais limites ? Le droit est-il si clair ?
BG:Le bon sens devrait conduire chacune de nos actions en ces temps de dérèglement climatique. Nous continuons malgré tout à fermer les yeux sur les principes élémentaires de la nature. L’eau peut être captée à des fins d’irrigation, mais c’est bien l’échelle des dispositifs qui doit interpeller les décideurs politiques. La solution est multifactorielle, tout comme le problème. Nos habitudes de consommations et de production, notre organisation autour de la gestion de l’eau, l’aménagement des territoires, etc… Personne n’enfreint la loi.

C’est le manque de dialogue et de concertation qui fait défaut dans les conflits que nous connaissons.

Savez-vous comment découvrir si l’on a des capacités ou le don de sourcier ?
BG: Mon père avait ce don mais il ne l’a jamais vraiment exploité. J’ai eu le plaisir de m’y essayer un jour et j’ai été surpris du résultat. Je ne sais pas comment acquérir les compétences ou détecter ce don mais ce que je sais, c’est que les sourciers ont un lien particulier avec la Terre et ont une sensibilité particulière pour détecter la présence d’eau et pas que l’eau d’ailleurs.

Le changement climatique perturbe le cycle de l’eau : quel est le fait principal à connaître pour comprendre l’impact lié à l’eau ?
BG: Lorsque que j’étais jeune, je me passionnais pour les insectes et on me disait que l’environnement d’aujourd’hui n’était pas celui d’hier. On ne parlait pas encore de protection de la biodiversité. Le contraste entre aujourd’hui et l’époque de ma jeunesse est encore plus saisissant et inquiétant. L’environnement change et c’est très perceptible, y compris dans le cycle de l’eau. Les inondations ainsi que les périodes de sécheresses sont plus intenses. C’est ce qui provoque le début de prise de conscience que nous connaissons. Chacun de nos gestes au quotidien a un impact, même minime sur l’environnement.

Le philosophe et sociologue Edgar Morin vous a t-il toujours inspiré ?
BG:L’écouter me permet de prendre du recul sur la vie de manière générale ainsi que dans mon quotidien. Il influence mes choix professionnels. A l’heure des réseaux sociaux où la pensée construite est galvaudée. Il me fait penser à un de mes cousins éloignés, Philippe Taquet, qui de son expérience de paléontologue à travers le monde avait un regard éclairé du monde et des sociétés qui le compose.

La prévention contre les incendies : comment peut-on concilier la lutte de ce risque avec la gestion de l’eau domestique ?
BG:La prévention contre les incendies et la gestion de l’eau domestique sont décorrélées. La première met en jeu la gestion des forêts qui dans certaines régions doit être revue de manière fondamentale et c’est ce qui est entrain d’être fait suite aux incendies de 2022. Quant à la gestion de l’eau domestique, elle revêt davantage de l’action individuelle, faisant en sorte de la consommer avec sobriété.

Interview avec Jérôme Robert pour ApprofonLire

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